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république démocratique du Congo 

La gratuité de l’enseignement en RDC

 

Introduction

L’éducation étant l’un de nos champs d’actions principaux, nous avons désiré vous informer au travers d’une série d’articles sur différents sujets autour de celle-ci. Nous sommes interpellés par les chiffres alarmants d’enfants qui n’ont pas accès à l’éducation à travers le monde et à l’ère de la modernité et des avancées en tout genre, il est assez difficile de concevoir que nous vivons dans un monde où encore beaucoup de nos semblables n’ont pas les mêmes droits que d’autres. A travers cet article, nous aborderons le sujet de la gratuité de l’enseignement primaire, qui à notre sens, devrait être un dispositif clé pour faire baisser le taux d’analphabètes et d’enfants non-scolarisés dans le monde, mais qui semble trouver des difficultés à être mis en place. 

En décembre 1966, l’Assemblée générale des Nations Unis adopte un traité, le Pacte International Relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC), qui engage les pays signataires à garantir un certain nombre de droits à leurs populations. Parmi eux, il y a notamment le droit à l’éducation qui comprend le fait de permettre un accès gratuit à l’enseignement primaire et de le rendre obligatoire. En 2020, sur 258 millions d’enfants (de 6 à 18 ans) privés d’éducation, il y avait près de 60 millions d’enfants qui étaient en âge d’être à l’école primaire, cependant en 2021, on comptait 171 États signataires du PIDESC (voir image ci-dessous). 

 

Vert foncé : pays ayant ratifié le PIDESC; Vert clair : pays ayant signés le PIDESC; Gris : pays n’ayant ni signé ni ratifié le PIDESC. 

La gratuité scolaire est une politique menée par un État pour permettre l’accès à l’éducation garantie par un service public sans engagement de frais pour les usagers.  Comme évoqué plus haut, les pays signataires du PIDESC se disent vouloir agir en faveur de leurs populations en assurant le plein exercice de plusieurs droits. L’article 13 du PIDESC dit que “L’enseignement primaire doit être obligatoire et accessible gratuitement à tous”. Là où certains pays ne se sont pas seulement cantonnés à l’obligation de l’enseignement primaire, qui théoriquement renvoie jusqu’à l’âge de 12 ans, et ont ajouté à leurs législation une obligation de scolarité jusqu’à un certain âge afin de garantir également la gratuité de l’enseignement secondaire (en moyenne 16 ans pour la majeure partie des pays dits “développés”), d’autres pays ont mis un certain temps à mettre en place cette gratuité, et sont restés au stade de la gratuité de l’enseignement primaire. Nous ne pourrons pas ici écrire sur l’application de ce droit dans les 171 pays signataires du PIDESC, mais il est à constater que le peu de pays ayant signé le PIDESC et ne l’ayant pas encore légiféré ou l’ayant fait tardivement, sont des pays dits “à faible revenu” ou “intermédiaire”.  Nous allons ici faire un petit focus sur la République Démocratique du Congo, qui a tout récemment mis en application la gratuité de l’enseignement primaire. 

Le système éducatif congolais

 Le système éducatif congolais est administré par 3 ministères différents : le Ministère de l’Enseignement Primaire, Secondaire et Professionnel, le Ministère de l’Enseignement Supérieur et Universitaire et le Ministère des affaires sociales. Ce dernier est supposé prendre en charge les jeunes et adultes qui n’ont pas reçu un enseignement primaire et qui n’ont pas reçu les enseignements fondamentaux, cependant avec près de 60 millions d’habitants, en 2017, l’UNICEF recensait un taux de près de 30% d’analphabètes dans le pays, donc 41% de femmes et 21% d’hommes, soit approximativement 18 millions de personnes qui savent ni lire ni écrire.
L’enseignement dit national est organisé de la façon suivante : les écoles publiques et les écoles privées agréées. Dans les écoles publiques, certaines sont conventionnées et sont gérées par des congrégations religieuses (catholiques et protestantes), d’autres ne le sont pas et sont gérées par l’Etat directement.

 

Une gratuité progressive : une avancée en demi-teinte

En septembre 2010, une première annonce est faite pour rendre gratuits seulement 3 niveaux de l’enseignement primaire, pourtant la gratuité de l’enseignement primaire avait été inscrite dans Constitution du pays en 2006 bien que l’état eut signé le PIDESC en 1976 … Il est important de mentionner que paradoxalement à cette signature qui implique la gratuité de l’enseignement primaire, l’instauration d’un système de paiement de la scolarité dans le public avait été mis en place en 1980, suite à une crise économique : là où l’Etat postcolonial investissait près de 25% de son budget pour l’éducation avant la crise, elle finit par ne seulement investir que 7% de son budget après la crise.
Donc de 1980 jusqu’en 2010, le système éducatif congolais était majoritairement soutenu par les frais payés par les parents d’élèves, ils permettaient entre autres de financer le fonctionnement des établissements. En moyenne les familles pouvaient débourser jusqu’à 200$ par an pour la scolarité d’un enfant, ce qui représente une fortune quand on sait que 64% de la population ne vit qu’avec 2,15$ par jour selon un rapport de la Banque Mondiale*. Par conséquent beaucoup de familles très modestes avaient dû se résoudre à ne pas envoyer leurs enfants à l’école, ou à n’en envoyer que quelques-uns dans une fratrie.
Même si la question de la gratuité de l’enseignement primaire était discutée depuis un moment par l’État, l’annonce de la mise en application en 2010 va être faite du jour au lendemain, sans une réelle préparation du terrain : cette nouvelle mesure va créer un tel engouement auprès de la population que certaines provinces ont vu une augmentation de près de 250% des inscriptions dans certains de leurs établissements. Ce qui est une bonne chose dans la mesure où des enfants qui n’avaient jamais pu accéder à l’éducation jusque là ont pu rejoindre les bancs de l’école, mais l’insuffisance d’apports budgétaires et le manque de coordination sans pour autant qu’il y ait eu une augmentation des infrastructures n’ont pas permis d’accueillir les élèves dans de bonnes conditions. De fait, un surpeuplement des classes a été observé, ce qui laisse à penser que les conditions d’enseignement n’ont pas été des plus optimales pour l’apprentissage des enfants, de plus certains établissements avaient augmenté le prix des frais de scolarité des niveaux du primaire qui n’étaient pas encore gratuits à ce moment-là.

 

En 2019, l’Etat congolais annonce étendre la gratuité de l’enseignement sur tous les niveaux de primaire et pour toutes les villes du pays, car en 2010 certaines villes n’étaient pas concernées par cette mesure. Pour l’année 2022-2023 on compte près de 3 millions d’enfants qui ont pu s’inscrire à l’école. Les mêmes difficultés rencontrées en 2010 apparaissent : des classes surchargées, des enseignants peu formés et mal rémunérés (environ 185$ par mois, quand ils sont payés …). Mais ce n’est pas pour autant que les familles se refusent à inscrire leurs enfants, animés par un désir de voir leurs progénitures accéder aux enseignements fondamentaux, les inscriptions ne font que s’accroître.

On remarque que ce n’est pas une question de moyens d’investir dans l’éducation mais bien une question de volonté : en 2023 le budget annuelle voté par le gouvernement congolais a été de près de 16 MILLIARDS de dollars, comment expliquer qu’un pays dit “pauvre” puisse avoir autant d’argent en terme de budget et ne pas l’investir dans l’éducation, en construisant des infrastructures capables de d’accueillir tous les enfants en âges d’être scolarisés dans de bonnes conditions ?

 

*Chiffres de l’année 2021.

Sources : 

https://www.eca-creac.eu/sites/default/files/pdf/2012-08-deherdt-munongo.pdf

https://www.coalition-education.fr/enjeux-education-publique-et-gratuite-46.html#:~:text=En%20Afrique%20subsaharienne%2C%2015%20pays,cycle%20de%20l’enseignement%20secondaire.

https://www.cairn.info/revue-autrepart-2010-2-page-23.htm#s1n3

https://www.rfi.fr/fr/afrique/20211002-rdc-hausse-de-salaire-pour-les-enseignants-en-gr%C3%A8ve-les-n%C3%A9gociations-continuent

https://wikimemoires.net/2019/12/le-systeme-educatif-congolais-structure-et-financement/

https://www.radiookapi.net/2019/09/08/actualite/securite/en-rdc-le-taux-dalphabetisation-est-de-773-statistiques-de-2017

https://www.radiookapi.net/2016/04/07/emissions/dialogue-entre-congolais/theme-bilan-de-la-gratuite-de-lenseignement-primaire

https://www.unicef.fr/convention-droits-enfants/education/

https://www.ouest-france.fr/monde/organismes-internationaux/onu/droits-de-lhomme-lonu-lance-un-appel-aux-pays-non-signataires-3902479#:~:text=Parmi%20les%20pays%20qui%20n,%2C%20et%20les%20%C3%89tats%2DUnis.

https://www.inegalites.fr/La-scolarisation-des-enfants-progresse-dans-le-monde#:~:text=Lecture%20%3A%208%20%25%20des%20enfants%20en,les%20estimations%20de%20l’Unesco.&text=En%20primaire%2C%20l’acc%C3%A8s%20%C3%A0,enfants%20non%20scolaris%C3%A9s%20en%202000.

https://www.radiookapi.net/2022/12/16/actualite/economie/rdc-le-senat-vote-le-budget-2023-reevalue-plus-de-16-milliards-usd#:~:text=Apr%C3%A8s%20la%20commission%20paritaire%2C%20les,milliards%20arr%C3%AAt%C3%A9%20par%20le%20gouvernement.

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